Les limites des biocarburants

Une des questions, qui revient souvent lorsque est abordé le thème de la substitution du carbone fossile par le carbone végétal, est de savoir si les gisements de biomasse sont suffisants pour satisfaire nos besoins futurs.  Beaucoup pensent que ce remplacement est utopique et très discutable car rouler totalement aux biocarburants nécessiterait des disponibilités en terres arables qui sont considérables et hors de portée. En effet, pour produire 50 millions de tonnes équivalent pétrole, il faudrait mobiliser durablement 3 à 4 fois la superficie des terres agricoles actuelles, quitte à supprimer les forêts, les prairies…et les villes !). A titre de comparaison, en 2016, la France a consommé plus de 100 millions de tonnes de pétrole, dont la moitié dédiés aux transports. Au niveau mondial, les 1 400 millions d’hectares de terres arables disponibles permettraient de couvrir 40 % de nos besoins énergétiques, en supposant que l’intégralité des récoltes soient destinées à la production de biocarburant.  De plus, le fait que la production de cultures « biomasse » nécessite davantage de terres agricoles pourrait interférer avec le besoin de terres pour la production de denrées alimentaires, et pourrait même, selon certains, aggraver la famine dans le monde.

Une autre remarque est faite sur le fait que les biocarburants sont bien souvent utilisés comme additifs aux essences traditionnelles. En effet, on ne trouve des automobiles roulant avec 100 % de biocarburant qu’au Brésil. Une modification des moteurs est nécessaire pour autoriser de l’alcool pur et la France ne semble pas prête à autoriser l’évolution du parc automobile. De plus, certains biocarburants ont un mauvais rendement brut, ce qui sous-entend l’obligation d’améliorer le système.

Un point souvent mis en avant pour favoriser et légitimer la valorisation de la biomasse est les bénéfices environnementaux liés à la substitution de l’énergie fossile par la bioénergie. Les biocarburants n’émettent-ils aucun gaz à effet de serre ? Beaucoup de contradictions existent à ce sujet et la question est loin d’avoir trouvée une réponse complète. Certains parlent d’une réduction de 80 à 90 % en rejets nocifs pour l’environnement, en prenant en compte les émissions dues aux consommations intermédiaires (engrais, engins agricoles, procédés de transformation). D’autres estiment qu’aucune production d’énergie n’est à 100 % « propre » et que la limitation en dioxyde de carbone ne doit pas occulter les autres composés rejetés par le carbone végétal lors d’une agriculture intensive (N2O, CH4). De plus, peut-on réellement parler d’avantages environnementaux quand on imagine la consommation d’eau et d’engrais que vont demander ces cultures ? Que penser de l’appauvrissement progressif du sol et de son érosion ? N’oublions pas non plus que certaines régions demanderont d’être déboisées engendrant une possible réduction de la biodiversité.